Dans la famille des drames pour adolescents, je demande le drame lesbien. La sortie de la série First Kill était l’une des plus attendues en ce début d’été 2022. Disponible depuis le 10 juin, le show est l’une des séries les plus demandées au cours de ces 100 derniers jours. Dans l’attente d’un possible renouvellement pour une saison 2, revenons en ce dernier jour de Pride sur les éléments à succès de cette série pour adolescents.
Il y a bien longtemps que les drames pour adolescents surnaturels n’avaient pas fait sensation. Aucune série du genre ne semblait pouvoir combler le vide laissé par The Vampire Diaries disparu en 2017. Mais 5 ans plus tard, si on lui laisse ce temps, First Kill pourrait bien rejoindre le haut du panier. La série possède tous les ingrédients de la bonne série super-naturelle : petite ville, mythologie, histoire ancestrale, secrets et complots. La série est une adaptation de la nouvelle du même nom écrite par V.E. Schwab pour la collection Vampires never get old : tales with fresh bite.

L’auteure de la nouvelle décrit First Kill comme « Killing Eve meets Buffy » (Killing Eve rencontre Buffy).
« Sous des étoiles contraires, un couple d’amoureuse »
Sous fond de guerre ancestral entre monstres et chasseurs de monstres, se joue une histoire d’amour entre adolescentes. L’une, est un vampire, Juliette, qui se rêve humaine. Et l’autre est une chasseuse surentraînée, Calliopée, qui travaille à devenir une machine à tuer. Sur le papier, tout les sépare, mais dans la vraie vie tous les rassemblent. Les deux adolescentes doivent faire face à la rivalité historique entre leurs familles pour pouvoir vivre leur amour naissant sans savoir qu’une guerre se prépare. La série récupère le cliché des amants maudits, mais réussit à le remettre au goût du jour. Le succès réside dans le choix d’avoir deux protagonistes femmes.
Représentation réussie
Dans un contexte télévisé difficile pour la représentation lesbienne avec le « bury your gays trope » ou encore la pitoyable fin de la série Killing Eve en avril dernier, First Kill donne du baume au coeur. On a deux personnages ouvertement lesbiens. L’histoire ne se focalise pas sur leur coming out mais véritablement leur histoire d’amour. La série arrive à raconter les hésitations et les joies du premier amour en s’appuyant sur l’innocence du personnage de Juliette. Loin du regard hétéro-normé le drame lesbien à la Roméo et Juliette se lit comme une histoire subversive. L’homosexualité des amantes n’est pas un problème dans la série. La seule présence du lesbianisme offre un spectacle différent et enthousiaste, si bien que l’on arrive à passer outre les effets spéciaux médiocres. Pour les amoureux des effets visuels qui se sentent déçus, on rappellera que la qualité n’a jamais vraiment été au rendez-vous dans les séries pour adolescents, on pense notamment à la série Teen Wolf ou les séries CW. Toutefois, il est vrai que la vitesse de la narration peut troubler l’audience. Beaucoup de questions restent sans réponses. Pouvoir regarder une série d’une traite est révolutionnaire mais dans le cas de First Kill, le format Netflix rajoute à la rapidité de la narration. Les événements semblent parfois précipités. En réalité, le format Netflix ne fonctionne pas avec la narration rapide de la série et empêche le spectateur d’assimiler les informations clés. Cependant, le dernier épisode de la saison 1 reprend toutes les failles de l’intrigue, donne à voir un univers cohérent et pose donc les bases d’une saison 2 plus complète et cohérente.
En réalité, la série First Kill s’inscrit dans un genre pré-établi. First Kill n’est pas le premier de son genre. Pour les aficionados d’histoire LGBT, la série réveille les souvenirs perdus ou volontairement égarés de la websérie canadienne anglophone Carmilla. On y retrouve également le cliché des amants maudits.

Carmilla est une jeune vampire et tombe amoureuse de Laura, une humaine. Ensemble, le jeune couple va devoir pour sauver le monde. Tout comme First Kill, les effets spéciaux sont délaissés par manque de budget, la narration est parfois rapide mais dans un espace télévisé restreint pour la représentation lesbienne, Carmilla fut saluée par les critiques et intègre le ClexaCon, la plus grande convention annuelle pour la représentation des femmes LGBT. La série est également une adaptation d’un roman du même nom publié en 1872 par Sheridan Le Fanu. Il semblerait donc que le salut lesbien passe les bouquins obscurs !
Les critiques reprochent à First Kill son caractère éclectique et ses références tous azimut. En effet, First Kill emprunt son univers à tout un imaginaire collectif de Shakespeare à Vampire diaries en passant par Buffy et bien d’autres. Mais c’est justement dans cette pluralité que la série puise sa force. Chacun peut y retrouver son œuvre de fiction préférée, et malgré les références, First Kill arrive à créer quelque chose de nouveau. La représentation lesbienne vient terminer ce tour de force et ramène sur le devant de la scène de la fiction télévisuel un imaginaire lesbien adolescent. Les bases pour faire de First Kill une série inoubliable dans la pop culture sont là, à voir si Netflix saura saisir l’occasion ou passera une énième fois à côté.